Alors que le nouveau collège Eugène Vigne vient d’ouvrir ses portes lors de la dernière rentrée scolaire, les élus d’opposition de gauche au conseil municipal ont proposé le transfert de la statue d’Eugène Vigne dans l’enceinte du nouvel établissement au maire de Beaucaire et au président du Conseil général du Gard.
Cette statue, située à l’origine cours Gambetta, a été reléguée à l’entrée de l’école de la Condamine, au prétexte que l’école souhaitée par E. Vigne a d’abord siégé en ces lieux. Si la première école primaire supérieure créée à Beaucaire a bien été accueillie (et non construite) à la Condamine, il eût été normal qu’en 2002, la statue jugée indésirable sur le cours Gambetta par la municipalité André soit transférée dans le collège qui portait son nom.
Les raisons de cet exil sont peut-être à rechercher dans la vie, les idées et les actes de ce grand bienfaiteur de la ville. Qui fut donc Eugène Vigne ?
Né à Beaucaire en 1818, ce négociant en bois fortuné fut conseiller municipal dans l’opposition. Il lutta, sous le régime autoritaire du second Empire, contre le maire conservateur Crouzet. Il eut, avec ses amis, plusieurs fois maille à partir avec la police de ce régime et ce jusqu’à sa chute en 1870.
Dès 1866, avant Jules Ferry, il proposa la création à Beaucaire d’une école primaire supérieure, laïque et gratuite «une école où tout enseignement religieux serait proscrit, l’instruction religieuse devant appartenir à la famille».
On ne peut cependant l’accuser d’anticléricalisme car il stipula dans son testament en 1875 que, si l’école dont il assurerait le financement n’était pas fondée et ouverte 18 mois après sa mort, il lèguerait ses biens au Consistoire protestant de Nîmes «à charge pour lui d’établir des écoles à Beaucaire, ceci sans conditions, même sur le plan religieux».
L’école vit le jour, dans l’école de la Condamine en 1882, soit un an après sa mort.
Grâce à lui Beaucaire disposait d’une des premières écoles primaires supérieures du Gard. Eugène Vigne institua aussi un prix destiné «à stimuler le zèle des Beaucairois en matière de diffusion de l’instruction». Ce prix, qui couvrait à l’époque une bonne partie des frais de scolarité d’un élève, est aujourd’hui symbolique.
Craignant que l’exil de sa statue rue Jean Moulin plonge la mémoire de ce grand homme dans l’oubli définitif, nous souhaitons ardemment que la demande des élus de gauche soit prise en considération afin d’honorer un personnage exemplaire pour nous, qui a accordé ses principes avec ses actes contrairement à beaucoup des laudateurs actuels de la laïcité qui en parlent beaucoup mais ne font rien pour elle et quelquefois la combattent sournoisement.
Grâce à lui, l’école pour tous, laïque et gratuite, s’est inscrite dans la vie des Beaucairois.